Économies d’énergie : le sérieux et le … ridicule ?
Publié le 6 sept. 2022 à 18:00
« Sobriété » : le mot est décidément à la mode. Très usité dans la bouche de certains courants militants associatifs depuis longtemps, il appartient désormais au vocabulaire courant politique. Emmanuel Macron l’a réemployé ce lundi, comme il l’avait déjà fait auparavant, et on a même lu, courant juillet, une tribune-appel sur ce sujet sous la plume des patrons des trois principaux énergéticiens français (EDF, TotalEnergies, Engie ).
De toute évidence, le mot de sobriété est à manier avec précaution dans la mesure où une partie des Français applique la chose sans utiliser le mot tout simplement parce qu’ils n’ont pas le choix faute de revenus : pour eux, limiteur le chauffage et la consommation d’électricité ou de carburants alimentés de réflexes banals. C’est souvent d’ailleurs le principal commentaire fait par certains syndicats et responsables publics.
Cette limite ne disqualifie toutefois en rien le concept. La crise énergétique actuelle (la fermeture du robinet à gaz russe, l’arrêt en France de beaucoup de réacteurs nucléaires et les prix internationaux de ces énergies) ainsi que les enjeux du dérèglement climatique invitent à économiser les énergies. Quand elles seront toutes décarbonées, la situation sera sans doute différente, mais nous en sommes loin…
Concrètement, Emmanuel Macron a invité tous les Français, les entreprises et les collectivités territoriales à réduire de 10% leur consommation d’énergies. Et il leur a proposé de s’inspirer des recommandations d’ Ecowatt.fr, un site Internet mis en place par RTE (le gestionnaire du réseau de transport d’électricité) et l’Ademe (l’Agence de l’environnement et de maîtrise de l’énergie) : ce sont les « écogestes » .
Le résultat, utile, montre bien aussi combien ce type de communication doit trouver le bon dosage entre les vraies préconisations et celles qui sont tellement de bon sens qu’un certain nombre de Français aura l’impression qu’on les prend pour des imbéciles ! Parmi les 21 mises en évidence, on trouve la baisse de la température des logements à 16 ou 17° la nuit et en cas d’absence, l’extinction des appareils qu’on n’utilise pas (TV, consoles de jeux etc. ) ou une désincitation à l’usage du cloud.
Mais pas seulement. Nous sommes tous invités aussi à « couvrir les casseroles » quand nous chauffons de l’eau sur les plaques électriques ou la gazinière, à « éteindre le chauffage d’une pièce en cours d’aération », à veiller à bien remplir les lave- linges et lave-vaisselle avant de les utiliser et encore à « éteindre les lumières non utilisées » … Non, vraiment, quelles surprises, personne n’y aurait pensé !
Ce qui est de l’excès de zèle ne remet pas en cause les conseils pour les écogestes, mais invite les responsables de ces organismes à relever leur niveau d’information. Notamment sur les ordres de grandeur, qui manquent si souvent. Voilà des données bienvenues qu’on déniche sur le site : un degré de moins, c’est 7% de consommation de gaz gagné ; une ampoule à éteindre par foyer, c’est une centrale à charbon arrêtée.
Le GIEC liste pour sa part des mesures d’économies (voir le tableau présenté par la climatologue Valérie Masson-Delmotte à un séminaire de ministres) et nos voisins européens ont aussi leurs idées. En Italie, les pouvoirs publics recommandent de renoncer à deux heures de chauffage par jour ou de limiter le thermomètre de 2° ; en Espagne les commerces sont éteints à 22 heures et en Allemagne le Bundestag est éteint la nuit.
A noter qu’Emmanuel Macron et le gouvernement n’évoquent pas, quand ils veulent réduire de 10% la consommation d’énergie, celle des carburants. D’abord parce qu’aucune pénurie ne menace, ce qui est un point clé. Mais également parce que le sujet, par exemple de la diminution de la vitesse sur les routes et autoroutes (pourtant levier évident pour réduire les émissions de CO2), est explosif depuis les Gilets Jaunes…